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InformationsPublié le 21 décembre 2023

L’intelligence artificielle en mode jeu : l’IA maîtrise le jeu de cartes « Cyber Shield »

« Cyber Shield » est le nouveau Serious Game de l’Armée suisse destiné à sensibiliser et à développer les connaissances de base dans le domaine de la cybersécurité et de la défense électromagnétique. Jusqu’à présent, ce jeu a été développé et analysé exclusivement à l’aide de parties humain contre humain chronophages. Pour améliorer ce processus, armasuisse Science et technologies (S+T) développe actuellement une intelligence artificielle capable de jouer le rôle d’un ou de plusieurs joueurs.

Matthias Sommer, recherche opérationnelle et analyse de systèmes chez armasuisse Science et technologies, Stefan Lehmann, cyber protection dans le projet Commandement Cyber

Évolution des scores après les tours de jeu et le logo du jeu de cartes ainsi que diverses cartes à jouer

Introduction au jeu « Cyber Shield »

Cyber Shield est un jeu stratégique à deux joueurs (1 contre 1). L’objectif est d’augmenter la taille de ses propres réseaux en toute sécurité. Plus les réseaux d’un joueur sont robustes, plus ses réseaux valent des points. De nombreuses cybermenaces insidieuses peuvent être utilisées pour affaiblir les réseaux de l’adversaire et réduire le nombre de ses points. Le premier joueur à atteindre un score de 10 points ou plus à n’importe quel moment gagne immédiatement la partie. Un joueur qui ne peut pas tirer de carte ou dont le score total est de -10 ou moins à n’importe quel moment perd immédiatement la partie. Les joueurs alternent les rôles actifs et passifs et, dès que c’est leur tour, ils piochent de nouvelles cartes dans leur deck. Chaque joueur joue ses cartes de sa main et les place au centre de la table, dans sa zone de réseau. Tour après tour, des réseaux de plus en plus complexes se mettent en place et les menaces se multiplient : une course implacable.

Définition du problème

L’une des difficultés du développement de jeux de stratégie est de maintenir l’équilibre du jeu tout en le rendant intéressant. Par exemple, aucune carte ne doit être dominante au point de conduire à une victoire certaine. Dans les jeux complexes comme « Cyber Shield » de l’Armée suisse, il n’est pas évident de savoir d’emblée si le jeu est équilibré, soit de garantir qu’aucune carte est trop dominante et qu’aucune stratégie conduit obligatoirement à la victoire, car même avec un nombre relativement faible de cartes, les combinaisons sont très nombreuses. Pour le savoir, des parties jouées jusqu’à présent par des humains ont été analysées. Toutefois, comme chaque partie prend beaucoup de temps et que les résultats ne sont disponibles que sous forme analogique, l’auteur du jeu n’a pas la possibilité d’évaluer de manière définitive les nombreux cas spéciaux qui ne se présentent que rarement.

Un millier de parties jouées en un rien de temps grâce à la numérisation

Il est donc plus efficace de numériser le jeu, puis de développer des agents logiciels capables de jouer à ce jeu de cartes avec une vision stratégique. L’apprentissage par renforcement (reinforcement learning) est une méthodologie qui permet précisément d’atteindre cet objectif. Cette méthode issue du domaine de l’intelligence artificielle apprend par « trial and error » (essai et erreur) la stratégie gagnante d’un jeu et peut ensuite l’appliquer dans des parties contre d’autres agents logiciels ou même contre des humains.

Dans le cas du « Cyber Shield », un collaborateur d’armasuisse Science et technologies et un autre de la Défense ont mis en œuvre le processus décrit ci-dessus, en collaboration avec un partenaire de recherche externe. Les premiers tests ont montré que les « agents intelligents » développés pouvaient égaler un joueur humain moyen. Il est donc désormais possible de disputer des milliers de parties en très peu de temps et de tenir simultanément un registre de chaque carte jouée.

Constats attendus

Le projet n’ayant débuté qu’à l’automne 2023, nous ne disposons pas encore d’informations fiables. Ce qui ressort déjà et qui constitue en quelque sorte le résultat principal, c’est que le jeu ne peut pas être « cassé », c’est-à-dire qu’il n’y a pas de stratégie gagnante qui domine tout. Voici quelques exemples d’autres affirmations possibles ou de caractéristiques à prendre en compte :

  • Il n’y a pas de lien statistique entre le joueur qui commence et les chances de gagner la partie : les deux joueurs gagnent le même nombre de fois.
  • Le nombre moyen de tours jusqu’à ce qu’un joueur gagne est de 35, bien qu’il y ait aussi des parties avec seulement 6 tours, et d’autres jusqu’à 60.
  • Évolution des scores (points), voir illustration 1.
  • Fréquence des cartes jouées par partie, c’est-à-dire combien de fois chaque carte a été jouée.
  • Gain moyen de points pour chaque carte, c’est-à-dire comment une carte jouée affecte le score des deux joueurs.

De plus, les stratégies des agents peuvent être paramétrées. Il est par exemple possible de spécifier l’agressivité avec laquelle un agent doit agir et d’en déduire ainsi la relation entre l’agressivité et les « chances de gagner ».

Ces connaissances aident à développer le jeu « Cyber Shield ». Il est ainsi possible d’intégrer des aspects cyber plus complexes, ce qui permet de sensibiliser la troupe à ces aspects tout en favorisant la compréhension de base dans le domaine de la cybersécurité.

Sur l’axe des ordonnées, on peut voir l’évolution du score et sur l’axe des abscisses, le nombre de tours joués.

Simulation (admin.ch)

Cyber Shield – Le Serious Game pour la cybersécurité (admin.ch) (en allemand)